Rassurer et surfer sur la V.AG.U.E.
Constat
L’orthographe lexicale est un apprentissage primordial dès le CP. L’orthographe française est complexe parce qu’elle n’est pas transparente : nous ne prononçons pas les mots comme nous les écrivons (ex : longtemps), et nous n’écrivons pas comme nous prononçons.
Si l’on considère l’orthographe lexicale : le son [s] ne compte pas moins de 7 graphèmes[1] :
/s/ (salade) , /ss/ (tasse) , /c/ (citron), /ç/ (garçon) , /sc/ (piscine) , /t/ (addition), /x/ (dix). Et parfois le /s/ se prononce [z] (rose). Pas simple tout cela.
La complexité ne s’arrête pas là. Elle est accentuée par la présence d’un /s/ muet en finale qui parfois se retrouve à la fin d’un mot au singulier (la souris) alors qu’à d’autres moments c’est un morphème[2] qui marque le pluriel (les filles) et trouve donc une explication du côté de l’orthographe grammaticale.
Les difficultés de la correspondance grapho-phonétique tient en cinq points :
1- Un phonème[3] peut présenter plusieurs graphies : l’exemple du phonème /s/ cité précédemment
2- Un graphème peut se prononcer de plusieurs manières : la graphie /c/ correspondra soit au son /s/ soit au son /k/,
3- Un phonème peut équivaloir à un graphème complexe c’est-à-dire composé de plusieurs lettres : L’exemple ici peut être le phonème /y/ qui correspond graphiquement à ou,
4-Un graphème peut équivaloir à plus d’un phonème : L’exemple de la graphie /t/ qui se prononce [t] (table) ou [s] (addition) selon le contexte,
5- Certaines graphies sont muettes.
Rassurer :
Le rôle de l’enseignant va être primordial pour rassurer l’enfant et faire en sorte qu’il ne perde pas confiance en lui. Il est donc important de porter une attention particulière aux mots qui seront donnés à apprendre à la maison ou qui seront abordés dès les premiers écrits en classe. Certains critères sont à respecter :
- La fréquence des mots
- Comprendre les mots
- Commencer par des mots transparents (l’écriture utilise des graphèmes simples les plus fréquents)
C’est grâce au choix réfléchi des mots que l’enfant abordera la langue française sereinement et en ayant la sensation que « c’est trop facile ! »
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Vous avez peut-être connu l’époque où, avec les élèves de CP/CE1, nous relevions tous les costumes du son [a]. Nous démontrions alors que les graphèmes étaient nombreux. Si nombreux que même un scripteur aguerri en avait le tournis (â – âne / at – nougat / as de bras/ etc)
Le [as] de bras ou le [at] de nougat seront abordés lorsqu’on abordera les lettres finalement muettes et que les enfants comprendront que ces lettres finales jouent un rôle parce qu’elles aident à écrire les mots d’une même famille.
V comme Valoriser:
Valoriser les régularités de la langue française afin de permettre à l’enfant d’orthographier les mots de façon correcte, le plus souvent possible. En français, « Les lettres servent, de façon prévisible, à transcrire des sons dans 80% des cas.» (Nina Catach).
Il est essentiel de s’appuyer sur ces 80% et de ne pas mettre en lumière les 20% restant.
Par exemple : dire à l’enfant : si j’entends [a], j’écris a dans pratiquement 100% des cas. Le mot femme est une irrégularité qui sera mis en lumière lorsqu’on le rencontrera. Seul ce mot devra être appris par cœur.
A comme Accompagner :
Il est important d’aider les enfants à comprendre qu’écrire n’est pas une devinette. Le plus souvent l’orthographe a une explication.
Il est important d’accompagner l’enfant à réfléchir très tôt sur la langue française pour aimer la comprendre. Au fur et à mesure que l’enfant grandit et gagne en maturité on sera plus explicite.
Exemple : une fermière ou une fermiaire ? avec de jeunes enfants (CE1) , il est assez facile de leur demander de chercher un mot de la même famille au masculin (le mari de…)
Un fermier à une fermière. Un secrétariatà Une secrétaire
Avec des élèves de cycle 3 (CM) on pourra évoquer les noms, les adjectifs et les suffixes.
Si c’est un nom, dans la grande majorité des cas, on écrira le suffixe -ère (une cafetière, un cimetière, une sorcière, boulangère – sauf une moustiquaire qui sera le mot irrégulier à apprendre par cœur)
Si c’est un adjectif qualificatif, dans la grande majorité des cas, on écrira le suffixe -aire ( glaciaire, satellitaire, solaire)
G comme Guider
On peut guider l’enfant pour :
-qu’il réfléchisse sur la langue
– qu’il crée la liste des mots qui ne répondent pas à la règle de régularité (= les cas particuliers) et les apprennent par cœur ;
– qu’il trouve la meilleure façon d’organiser son travail en fonction de ses préférences = utiliser un répertoire, un carnet, des boites à mots, des enveloppes etc.
– vérifier qu’il comprend chaque mot. En effet pour retenir l’orthographe d’un mot, il faut en comprendre le sens. La forme écrite du vocable doit se rattacher à sa prononciation et renvoyer à son image mentale.
U comme Utiliser
Encourager l’enfant à utiliser :
- Les outils qu’il a créés
- – Les mots appris en les intégrant dans une phrase orale et/ ou écrite.
Plus un mot est utilisé plus il entre dans le vocabulaire actif et fait parti du corpus acquis par l’enfant. De même, plus l’enfant l’écrira plus il maitrisera son orthographe. D’autre part, dans le cadre d’une production écrite, il se confrontera alors à l’orthographe grammaticale qui lui demandera d’être attentif aux accords ou à la conjugaison.
E comme Expliciter
Encourager l’enfant à expliciter ses choix lorsqu’il écrit :
– Rappeler une régularité
– Expliquer la règle découverte
– Expliquer un mot de vocabulaire et décrire l’image mentale qu’il s’en fait.
[1] Lettre ou groupe de lettres transcrivant un phonème.
[2] Renvoie à une catégorie grammaticale exprimant le nombre, le temps, le genre, le mode
[3] Élément sonore du langage parlé, considéré comme une unité distinctive.